II Identifier le rôle du droit négocié
A/ Les différents accords et leur portée
– Le niveau le plus élevé de la négociation collective est le niveau national : la négociation peut porter sur un accord national interprofessionnel (ANI), qui traite de sujets d'intérêt commun : le chômage, la formation professionnelle, les aménagements du temps de travail... Ce type d'accord a vocation à s'appliquer aux salariés de toutes les branches professionnelles mais en ne traitant que certains aspects de la vie sociale.
À la différence d'un ANI, la convention collective de branche détermine l'ensemble des conditions de travail et de la protection sociale des salariés d'une branche déterminée. Elle se conclut en général au niveau national.
– Au niveau de l'entreprise ou de l'établissement, les partenaires sociaux négocient des accords d'entreprise ou d'établissement, dont la fonction est de favoriser l'adaptation des règles de droit aux spécificités de l'entreprise, à sa taille ou aux problèmes qu'elle connaît.
L'accord collectif, qu'il s'agisse d'un ANI ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement, a une portée moindre qu'une convention collective puisqu'il ne traite qu'un ou plusieurs sujets déterminés (par exemple, la durée du travail, les congés payés, la politique salariale).
B/ Le principe de faveur et les accords dérogatoires
– Le principe de faveur constitue une règle favorable aux salariés. Les accords collectifs, sources « inférieures » de droit par rapport à la législation, peuvent édicter des règles différentes des dispositions de la loi seulement si la dérogation est favorable aux salariés (salaire minimum professionnel supérieur au SMIC, durée des congés payés majorés...). L'intérêt de la négociation collective est alors évident pour les salariés : elle complète, en les améliorant pour eux, les dispositions du Code du travail ou d'autres textes. Quant au contrat de travail, ses stipulations ne peuvent jamais faire exception au principe de faveur.
– Les accords dérogatoires sont des accords collectifs qui édictent une règle de droit dérogeant à la règle supérieure sans être favorable aux salariés (accroissement de la durée hebdomadaire de travail par rapport à la durée légale de 35 heures, taux de rémunération des heures supplémentaires inférieur au taux légal...). L'enjeu de ces accords dérogatoires n'est pas de pénaliser les travailleurs mais d'adapter le droit aux spécificités d'une branche d'activité ou d'une entreprise. La loi encadre l'adoption de ces accords dérogatoires.
– Quand la règle de droit est prévue par une source étatique (loi, ordonnance...), les accords collectifs doivent, en principe, respecter le principe de faveur. Si des accords dérogatoires peuvent exister, c'est ici uniquement sur autorisation de la loi.
– Quand la règle de droit est contenue dans un ANI ou dans une convention collective de branche, les accords collectifs d'entreprise peuvent être dérogatoires, mais l'accord national prime dans certains domaines définis par la loi : salaires minimums, grilles de classification, égalité hommes-femmes...
C/ L'obligation légale de négocier
La loi impose, sinon de conclure des accords, du moins de tenter de le faire au travers de négociations périodiques.
Au sein de l'entreprise, un accord particulier peut prévoir les modalités de la négociation récurrente. À défaut, l'employeur doit engager, dans les entreprises où sont présentes des sections syndicales :
– chaque année, une négociation sur la rémunération, sur le temps de travail, sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur la qualité de vie au travail ;
– tous les trois ans, dans les entreprises d'au moins 300 salariés, une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels.
D/ L'information des salariés
C'est en principe une convention de branche ou un accord professionnel qui précise les conditions dans lesquelles les salariés sont informés du droit conventionnel applicable à l'entreprise. À défaut d'un tel accord, l'employeur doit respecter diverses obligations :
– lors de l'embauche, remise au salarié d'une notice d'information relative aux conventions et accords applicables dans l'entreprise ou l'établissement ;
– remise d'un exemplaire de la convention ou de l'accord collectif au CSE (comité social et économique) et aux délégués syndicaux ;
– mise à disposition du personnel d'un exemplaire des accords applicables dans chaque établissement et affichage d'un avis à ce sujet ;
– dans les entreprises dotées d'un intranet, mise à disposition d'un exemplaire à jour des accords collectifs intéressant le personnel ;
– mention de l'intitulé de la convention collective de branche sur le bulletin de salaire.